jeudi 10 février 2011

Comme une vieille basket

Quelque part dans le monde, le soir, dans un placard à chaussures familial, Converse gauche et les Zara Fall/Winter 2008 font un brin de causette :

_Salut les Zescarpin !

_Salut mon vieux, fit l’escarpin gauche. Ben alors, qu’est ce que tu deviens ? Ca fait un bail qu’on t’a pas vu !

_Ouais je sais, souffla la Converse. J’ai eu des moments difficiles. Mon amie est passée à la trappe par erreur au dernier nettoyage de printemps. Après c’était pas évident, la solitude d’une chaussure, tout ça…

_Ah ouais, on en a entendu parler, s’apitoya l’escarpin droit. C’est moche ! Mais c’est la vie que veux-tu ? Un instant d’inattention et tu te retrouve dans le mauvais sac poubelle, celui qui part direct à la décharge.

Escarpin gauche donna un petit coup de talon à son homologue en lui faisant les gros yeux.

_Non mais ça a l’air d’aller là, continua-t-il à l’égard de la Converse, d’un air trop enjoué pour être honnête. Tu as l’air en forme.

_Ah ouais ? répondit la Converse. Ah tu sais, ce genre de mésaventure, ça laisse des traces indélébiles, conclut-elle en montrant aux escarpins son profil.

_Mazette ! s’exclamèrent les deux escarpins en voyant la colle grossièrement étalée qui retenait le logo de la marque de fabrique de leur ami basket.

_Mais… commença l’escarpin droit.

_Dépression, asséna la Converse d’un air entendu. Je me suis laissé aller, laissé glisser vers la mort. Forcément, le plastique de la semelle a d’abord lâché par endroit, puis quelques œillets de lacet se sont fait la malle, et ensuite, l’étape ultime… ça.

Toutes les chaussures du placard se taisaient désormais et observaient la blessure de guerre de leur ami Converse.

_Mais j’ai remonté la pente, maintenant ça va.

_Comment ? demanda avec intérêt une ballerine qui trainait par là.

Converse contempla ses amis dans la pénombre, tous suspendus à ses lèvres.

_J’ai repris espoir : la nouvelle collection est sortie.

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